ette rubrique comporte neuf différentes « entrées » qui permettront à chacun un regard plus approfondi à la fois sur l'oeuvre graphique de Roger Platiel et sur son parcours artistique, mais également sur sa vie d'homme. La rubrique «
»
rappelle les dates principales de la vie de l'artiste ; elle est
Ă©galement enrichie de nombreuses photographies de l'artiste Ă
différentes époques ou de documents. La rubrique «
» liste à la fois ses expositions personnelles et les principales expositions collectives auxquelles il participa entre 1958 et 1978, mais également les expositions posthumes ; elle est enrichie de nombreuses photographies d'affiches et de couvertures de catalogues d'expositions. La rubrique «
» nous a permis de retranscrire, notamment, les deux textes qui éclairent le mieux l'homme et l'artiste («
) ; nous pensons qu'il est tout à fait indispensable de les lire pour pénétrer dans le monde si particulier de l'artiste, comme il est important de lire le court extrait d'un interview télévisé que l'artiste donna à La Valette (Malte) en 1976. «
» vous fera découvrir un peu de l'environnement matériel du graveur et vous permettra de tourner les pages du carnet d'atelier de l'artiste. La rubrique «
» nous a permis de regrouper sur une même page les 19 cuivres ou zincs que nous avons pu retrouver à ce jour. Les rubriques «
» vous permettront de découvrir d'autres très nombreux documents sur l'artiste ou qui lui sont liés. Par leurs prêts, leurs dons, leurs souvenirs, la rubrique «
» nous a permis de citer tous ceux qui, à différents titres (proches, confrères, collectionneurs, amis, etc), ont permis la réalisation de ce catalogue raisonné ; cette rubrique se referme, en bas de page, sur un index des noms cités.
Biographie
1934Roger John Block naît à Paris le 2 janvier d'une mère allemande d'origine juive, anti-fasciste ayant fui le régime hitlérien avec le groupe politique de ses amis (membres de l'IKS - Internationaler Sozialistischer KampfbundInternationaler). Il est déclaré, par sa seule mère, de nationalité française. "Né de père inconnu", Roger ne connaîtra le nom de son père que 17 ans plus tard. La présence du nourrisson au sein du groupe ne facilite pas les choses. Roger est placé, dès l'age de 4 mois, dans un foyer pour enfants d'émigrés dans le sud de Paris.
1936L'approche de la guerre contraint sa mère - comme pour l'ensemble de son groupe, tous socialistes très engagés politiquement -, à le mettre en sécurité dans un regroupement d'enfants d'une institution danoise de réfugiés allemands créée à cet effet dès 1933 à Östrupgaard (Ecole de Minna Specht). Roger n'a pas encore 3 ans !
Dans le livre présenté ci-dessus, on découvre, p. 36, quelques lignes sur Roger : «
Roger avait pour habitude de regarder attentivement toutes les illustrations des livres, mais toujours . . . à l'envers ! ».
1939
Devant l'avancée de l'armée nazie, les éducateurs de cette institution quittent le Danemark et emmènent tous les enfants à Londres. Aussitôt, ils sont arrêtés par les autorités britanniques, et les enfants, dont Roger - qui n'a alors que 5 ans -, sont dispersés et placés dans des familles d'accueil.
1940-1946
Roger passe son enfance au sein d'une famille anglaise, dans une campagne isolée près de Stratford-sur-Avon, à Bredon Hill. Au coeur de la très belle campagne du Worcestershire, le jeune enfant découvre la nature. Il commence une collection de nids et d'oeufs d'oiseaux, d'insectes, de plantes, qu'il appelle son "musée". Ne rêve-il pas d'être entomologiste? Des bancs de la petite école anglaise qu'il fréquentera, Roger gardera toujours le souvenir de ses camarades raillant son nom juif dans les affreuses paroles d'une chanson enfantine inventée pour blesser. Nora Block est internée au camps de Gurs ; Hermann Joseph Platiel (Germain, de son nom de résistant) lui permet d'en sortir, déclarant avoir un enfant avec elle et souhaiter l'épouser. Le mariage a lieu le 14 janvier 1941 en Mairie de Montauban et l'acte de mariage est accompagné de la reconnaissance de l'enfant qui prend à cette date précise le nom de Roger Platiel.
1946-1949
Tout à fait anglicisé (il a oublié l'allemand), il retrouve ses parents à Zurich après 9 longues années de séparation. Ses parents le placent aussitôt dans l'internat de l' "Ecole de l'Humanité", une institution allemande à vocation internationale située près d'Interlaken (Suisse), en haute montagne. Roger y restera trois ans, ré-apprenant l'allemand. C'est à cette période qu'il découvre la réalité de la guerre et les causes de la séparation d'avec les siens. Là aussi, il découvre l'existence des camps et le génocide du peuple juif, l'appartenance juive de sa mère (incarcérée au camps de Guers en 1942) et la sienne propre.
En 1949, Roger - qui a 15 ans - fait une tentative de suicide en se tirant une balle dans la tête avec le révolver qu'il a subtilisé à l'un des ses professeurs ; il échappe miraculeusement à la mort, mais la balle ne pourra jamais être extraite.
1950
Roger a maintenant 16 ans. Il rejoint ses parents à Kassel en Allemagne, ceux-ci ayant regagné leur terre natale après seize ans d'exil (notamment à la demande de Willy Brandt, un de leur ami, qui deviendra chancelier fédéral de l'état allemand en 1969). Le jeune garçon passe ses journée au Musée d'Histoire Naturelle de la ville. Un ami de ses parents, Walter Nikush, peintre et graveur, lui donne ses premières leçons de dessin.
1952-1956Il commence ses études à la Werkakademie de Kassel (Académie des Beaux-Arts de Kassel), où ses parents se sont
installés en 1950 (130, Goethe-Stasse). Le directeur de la Werkakademie, Hans Leistikov, est
un fervent adepte des recherches du Bauhaus. Roger Platiel s'initie aux
arts graphiques et, plus généralement, à tout ce qui concerne le trait
(architecture, dessin, gravure) ; il se passionne aussi pour le lettrage. Il se lie d'amitié avec Isolde Baumgart, élève comme lui.
C'est au cours de cette période qu'il comprend que Hermann Platiel, "son père", n'est pas son véritable père et Nora, sa mère, mettra plusieurs mois pour le lui avouer et lui révéler le nom de celui qui lui a donné la vie : Gerhard Kumleben, installé en France dès 1929, fit partie du "Groupe de Paris" et mena les même combats que Nora. Juif, il sera spolié, à Paris au début de l'année 1943, de sa bibliothèque de 1200 volumes de références (sciences physiques, mathématiques, sciences sociales, histoire, philosophie, carnets de notes, manuscrits). Né en 1901, allemand, il vivra en France la seconde partie de sa vie ; il sera journaliste, activiste politique, auteur de nombreux ouvrages et articles sous son propre nom ou sous le pseudonyme de Francis Gérard. Il aura, dès l'immédiat après-guerre et jusqu'à sa mort en 1974, de nombreux postes importants au sein d'organismes français chargés, pour l'essentiel, de la réorganisation européenne.
Malgré des études aisées et brillantes, son adaptation personnelle à la vie allemande reste problématique.
Il entreprend, seul, un long voyage en stop, qui le mènera d'abord en Italie, puis jusqu'en Grèce qu'il visite véritablement avec passion.
C'est au cours de ces années qu'il décide d'un "retour" en Angleterre ; il profite de son court séjour pour rendre visite à Henry Moore dont il admire le travail.
1956Il a maintenant vingt-deux ans et part pour Paris. Rapidement, il s'inscrit à l'Atelier 17 de Stanley William Hayter, internationalement reconnu pour ses travaux et pour ses innovations dans l'art de la gravure. Il y découvre notamment le procédé des "couleurs simultanées" mis au point par Hayter, qui permet d'imprimer une épreuve avec plusieurs couleurs en un seul passage sous la presse.
Roger Platiel y réalise sa toute première gravure, "Coq" (n°1 du présent catalogue raisonné).
Isolde Baumgart le rejoint Ă Paris et travaille, elle aussi, la gravure chez Hayter.
L'on décrit alors Roger Platiel comme un jeune homme solitaire et secret, chercheur avant tout dans l'art de graver et qui veut suivre sa ligne, un jeune homme au tempérament fort et indépendant ; la coexistence avec Hayter, lui même d'une personnalité particulièrement affirmée, n'est pas toujours chose facile.
Alors qu'il veut vendre quelques livres de langue anglaise à la Librairie Shakespeare and C° (Paris), il fait la rencontre de Suzy qui devient sa compagne, avant de l'épouser quatre ans plus tard (1960).
Le jeune homme se met en quête de son véritable père qu'il finit par localiser en Bretagne ; Roger va à sa rencontre, mais celle-ci ne dure que quelques minutes. Son père, Gerhard Kumleben, a refait sa vie et ne souhaite pas que Roger en fasse partie. Cet épisode, en vérité, est une énorme déception pour lui et il en éprouvera durablement beaucoup de tristesse.
1957-1958
Roger Platiel, dès ces premières années, grave plusieurs plaques avec une grande maîtrise, d'abord à travers l'influence de Henry Moore, et des traces laissées par l'expressionnisme allemand. Dès ses premières gravures, se révéle une manière très personnelle d'installer dans une même oeuvre à la fois un espace pictural et psychique.
En 1958, il expose "Mensch und Technik" ("L'ĂŞtre et la technique") Ă
Bruxelles, dans le cadre de l'Exposition Universelle, une grande fresque
peinte en noir et blanc de 1,60 x 6,00 m.
1959Roger Platiel entreprend, avec Suzy, un voyage de plusieurs mois au Mexique et aux Etats-Unis. Une grande partie de ce voyage est faite Ă pied, Ă travers les montagnes et les "pueblos" indiens. Lors de ce voyage, il grave encore, cette fois avec . . . "les moyens du bord".
1960-1961Au retour de son voyage sur le continent américain, le jeune artiste opte définitivement pour la France. Désargenté, il s'installe dans une petite chambre à Montparnasse et retourne travailler au sein de l'Atelier 17. Il gravera douze plaques en 1960 ; dans le climat souvent nocturne et dense de ses gravures, traversé d'éclats fulgurants, la couleur s'intensifie, perdant un peu de sa transparence initiale.
Il reçoit commande pour la décoration d'une école dans l'Etat de la Hesse, Allemagne.
Roger Ă©pouse Suzy en 1960.
1962-1964Il monte son tout premier atelier personnel à Cachan en 1962 et achète une presse d'occasion à l'Abbaye de Cluny. Son atelier sera le point d'ancrage nécessaire à une production désormais plus intense.
Roger Platiel a besoin de voyages et, cette fois-ci, ce sera la France. Il visite de très nombreux sites préhistoriques (Lascaux, les Eyzies, etc). Cet intérêt pour la préhistoire se traduit dans la couleur par des tonalités "naturelles", moins sombres, (terre, sable, ocre), alternées avec des rouges sourds et des jaunes éclatants.
Il participe assez régulièrement à cette période à des expositions collectives en France et à l'étranger (Japon, Angleterre) et obtient plusieurs expositions personnelles.
1965Il fait son deuxième grand voyage de plusieurs mois, cette fois-ci en Asie. Passant par la Turquie, puis l'Iran, il ira jusqu'au Paskistan et exposera à Lahore.
1966-1967Boursier du Land de Hesse, Roger Platiel passe un an à Rome dans la Villa Massimo au sein de la « Deutsche Akademie ». A son habitude, il sillonne toute l'Italie, visite les sites antiques, les sites étrusques ou encore les villages "à trulli" (maisons rondes en pierre) du sud oriental de la Calabre.
On assiste, dans les gravures réalisées de cette époque, à une véritable explosion de la couleur, en même temps qu'à une condensation des formes.
1968-1971 Avec son épouse, l'année 1968 ouvre pour lui une période de trois ans où il vivra en Afrique, entrecoupée par de courts retours en France. Il part en Haute-Volta, où malgré l'absence de presse, il grave quatorze plaques (cuivre ou zinc) sous la case dans la seule année 1968. Il les imprime dans son atelier de Cachan, lors de ses brefs retour en France.
Les formats de ses planches deviennent plus grands.
En 1969, il expose au Centre Culturel Franco-VoltaĂŻque de Ouagadougou, en Haute-Volta (aujourd'hui Burkina Faso).
Il se déplace de Haute-Volta au Tchad en 1970, fait un long voyage, à pied et en camion, le long de la boucle du Niger. Il traverse le Sahara en 2CV. Suzy, elle, est maintenant ethnologue et se spécialisera dans la transmission orale des peuples africains.
C'est au cours de l'un des ces "voyages africains" que Roger rencontre Claire et cette rencontre changera le cours de sa vie.
1972Il fait son retour à Paris, quitte Cachan, profite un temps de l'atelier de son ami le graveur japonais Takesada Matsutani (Impasse de la Bonne-Graine, XIème arrondissement), puis installe son nouvel atelier à Paris, dans un nouveau local du XIème arrondissement. Il inaugure ainsi la troisième et dernière période de sa vie, où, comme dans les précédentes, son travail va se poursuivre jusqu'à la fin avec une extraordinaire intensité.
Il obtient plusieurs expositions personnelles et participe à quelques expositions collectives au cours de cette période (Allemagne, Angleterre, Israel, Malte).
Roger quitte Suzy avec laquelle il divorcera en 1974.
1973-1976
Il travaille énormément, tout en ne négligeant jamais de voyager. Ce sera la Yougoslavie, un retour en Suisse pour revoir l' "Ecole de l'Humanité" où il avait vécu une partie de son adolescence, un "retour aux sources" en Angleterre et sur la colline de Bredon Hill, lieu de l'enfance solitaire encore, en Italie et en Grèce, avec de longues errances dans les collines d'Arcadie et les montagnes du Péloponnèse.
Roger Platiel réalise de nombreuses gravures. Il inaugure maintenant une organisation de l'espace légèrement différente, en marquant, par la ligne ou la couleur, un "horizon" réel ou supposé, creusant une profondeur différente (ce que Erich Erzog définit comme "
une expression figurative, bien qu'énigmatiquement fermée, de la réalité d'un rêve parfaitement saisi.").
Une exposition à Malte est l'occasion du dernier de ses grands voyages, de ces errances qu'il a toujours aimées et recherchées dans l'élan d'une inlassable curiosité. Il rejoindra l'Îe de Malte au terme d'un long périple, à travers la Toscane, l'Ombrie, la Calabre et la Sicile.
1977Il travaille toujours sur un rythme très soutenu. Une exposition est prévue à Francfort pour la fin de l'année, mais le vernissage est ajourné lorsqu'en décembre, on découvre qu'il est atteint d'un naevus à la tempe.
Ce même mois, malgré la maladie, il grave en quelques heures et imprime deux exemplaires d'un cuivre qui ne ressemble à aucun autre : une sorte de navire spatial immobile flottant dans une nuit grise-bleutée. Sans doute la seule, dans son oeuvre graphique, qui n'obéisse pas à ces lois dynamiques que Roger Platiel recherchait. Il ne lui donne aucun titre (voir n°177 du présent catalogue raisonné).
1978Opéré en janvier, il connait une très bréve période de rémission et d'espoir. La semaine de repos qu'il passe en avril sur l'île de Porquerolles est son ultime voyage. Son état se dégrade vite. Roger Platiel meurt chez lui, le 20 juin, il avait quarante-quatre ans. Quelques jours plus tard, il est inhumé au cimetière du Père Lachaise à Paris (
Voir sa tombe).
Il a gravé sa dernière plaque en mars, sous le titre «
Trace », et l'imprime dans une fraîche tonalité rouge-orangée, à un seul exemplaire.
En septembre, une exposition de ses oeuvres récentes, prévue l'année précédente, se tient à Francfort.
1979La « Staatlichen Kunstsammlungen » de Kassel, en Allemagne, lui consacre une très exceptionnelle rétrospective dans laquelle la presque totalité de son oeuvre gravé est pour la première fois exposée. Un important catalogue est publié à cette occasion, établissant une liste des 179 gravures de la donation faite au Musée par Nora Platiel, la mère de l'artiste. On notera que seules 17 gravures sont reproduites dans ce catalogue.
1980Une seconde donation (de 104 estampes accompagnées de divers documents) sera faite par Mme Claire Bonnafé-Laurent au Cabinet des Estampes de la Bibliothèque Nationale à Paris.
Expositions
expositions personnelles & collectives
Nota : L'artiste étant disparu en juin 1978, toutes les expositions organisées à partir de cette année là sont des expositions posthumes.
1958The Print Club, Philadelphie, Etats-UnisWandbild auf der Weltausstellung, Bruxelles, Belgique *
> 1959Galerie Proteo, Mexico, Mexique
1961Kasseler Kunstverein, Kassel, Allemagne *
> 16ème Salon des Réalités Nouvelles, Paris, FranceTriennale d'Art Graphique de Grenchen, Suisse
Affiches de films d'Ă©tudiants de l'Ecole des Beaux-Arts,
Braunschweig, 1961
1962ICA - Institute of Contempory Arts, Londres, Angleterre3e International Biennal Exhibition of Prints, Tokyo, Japon * >
17ème Salon des Réalités Nouvelles, Paris, France * V
1963Galleria La Cittadella, Ascona, SuisseIIIe Biennale, Paris, France1964Galerie Lometsch, Kassel, Allemagne
* >Fondation Sala Mendoza, Caracas, VenezuelaGalerie Numaga, Auvernier-Neuchâtel, Suisse
19ème Salon des Réalités Nouvelles, Paris, FranceSalon de la Jeune Gravure Contemporaine, Paris, FranceMuseum für Moderne Kunst, Santiago, Chili
Cent gravures de Paris, Sydney, Melbourne, Australie1965Landesmuseum Oldenburg, Oldenburg, Allemagne
Galleria La Cittadella, Ascona, SuisseKĂĽnstler in Hessen seit 1780, AllemagneNational College of Arts, Lahore, Pakistan
* >IVe Biennale, Paris, FranceKunstsammlungen der Stadt Kassel, Allemagne1966Musée des Beaux-Arts, Neuchâtel, SuisseVilla Massimo, Rome, Italie * >1967Galleria Milano, Rome, Italie
* >Biennale dei Giovani Grafiche, San Benedetto di Tronto, ItalieNassauischer Kunstverein, Wiesbaden, AllemagneFour Artists from three Nations, Rome, Italie * V1968Kunstkabinett Offenbacher, Offenbach am Main, Allemagne * *
>Cinque artisti dell'atelier 17, Calcografia Nazionale,
Rome, Italie * V
1969Galleria La Cittadella, Ascona, SuisseCentre Culturel Franco-VoltaĂŻque, Ouagadougou, Burkina Faso *
1970Kasseler Kunstverein, Kassel, Allemagne * *
>Galleria La Cittadella, Ascona, Suisse 2e Internazionale d'Arte Biennale, Lignano, Italie *
2e Prints Biennale, Bradford, AngleterreGroupe Hayter, AustralieGroupe Hayter, Buenos Aires, Argentine
Biennale de la Gravure Internationale, Lignan, France
* V Kunstkabinett Esslingen, Esslingen, Allemagne
1971Galerie Mellier, Paris, France *
>Galerie TAO, Vienne, Autriche *
. . . . . . . Fra Atelier 17 - Grafiksyning, Reykjavik, Islande *
19723e Prints Biennale, Bradford, Angleterre *
>1973Galerie In Flottbek, Hambourg, Allemagne
Groupe Hayter, AustralieGroupe Hayter, Pescara, ItalieL'Estampe contemporaine à la Bibliothèque nationale de ParisKunstkabinett Offenbach, Offenbach am Main, Allemagne *
V
1974Galerie Nova, Hagen, Allemagne
* >Galerie Lometsch, Kassel, Allemagne *
1975Exposition Atelier 17, Paris, France1976Gordon Maynard Gallery, Welwyn Garden, Angleterre * >Galerie Eiko, Paris
* >Nora Art Gallery, Jerusalem, Israel *
VNational Museum of Fine Arts, Valetta, Malte *
V1977Atelier 17, Elvehjem Art Center, Madison, Etats-Unis * > 1978Galerie GrĂĽner Panther, Francfort, Allemagne
* > 1979Staatlichen Kunstsammlungen, Kassel, All. * *
V > 1980 Bibliothèque nationale de France, Paris, France *
Vivre la gravure, Musée des Beaux-Arts de Mâcon, France *
1981 Hayter et l'Atelier 17, M. des Beaux-Arts de Caen,
France Epreuves d'artiste, Centre Culturel d'Argenteuil, France *
> 1986 Galerie Ex-centric, Liège, Belgique *
>
1990 Galerie Le Cube, Paris *
>
Hayter e l'Atelier 17, Calcografia, Rome, Italie * >1993
* Hayter et l'Atelier 17, Musée
de Gravelines, France 1997Centro Cultural Recoleta, Buenos Aires, Argentine *
>2004Galerie Bonafous-Murat, Saint-Antonin-Noble-Val, France *
>
2007Galerie Bonafous-Murat, Saint-Antonin-Noble-Val, France *
> L'Arte e il Torchio, Atelier 17, Crémone, Italie *
Ecrits
Parcours d'un « Voyageur Astral » par Claire Bonnafé, écrivain.
Extrait de « Les Nouvelles de l'Estampe », n° 49, janvier-février 1980, pp 13-14Au terme d'une vie brève, Roger Platiel laisse les traces d'un esprit subtil et solitaire, alliant à une puissante imagination plastique une très singulière expression poétique.
Une œuvre achevée, en dépit du temps si court que lui assigna son destin.
Né en 1934 de parents allemands en exil, son enfance et sa jeunesse furent irrémédiablement marquées par le nazisme et la guerre qui, le condamnant à l'insécurité et à l'errance des années durant, laissèrent en lui une irréconciliable mémoire.
Parlant trois langues indifféremment -l'anglais, l'allemand et le français- il ne se reconnut jamais complètement dans aucune de ces trois cultures, se contentant de sourire ou de répondre par une boutade quand on lui demandait de quel pays il se sentait réellement. A travers l'horreur et le scepticisme que lui inspirait tout discours idéologique constitué, il portait aux événements contemporains une attention lucide, silencieuse et secrètement passionnée, rêvant d'un langage à venir où notre histoire, éternellement "racontée par un idiot" pourrait s'exprimer et se dire -et peut-être alors se vivre.
Dès l'adolescence, il chercha un lieu d'inscription personnelle qui ne fût soumis ni aux chaotiques incertitudes de l'histoire, ni à l'étroitesse des particularismes nationaux.
L'art de la gravure qu'il adopta à l'exclusion de tout autre moyen d'expression (précisément, dirait-on, à cause de ce curieux "angle mort" que la gravure occupe dans la sphère générale de l'art) lui offrit ce champ à l'intérieur duquel il fit simultanément œuvre de peintre. Car la magnificence de la couleur, une vibration éclatante et sourde portée au maximum de son intensité avec une extrême finesse, forme le feu central de sa recherche et ne saurait en être séparée.
Bien qu'il se considérât comme un "voyageur astral" (je le cite) libre de toute détermination culturelle pré-établie, il n'en avait pas moins une perception aiguë, intuitive et documentée de la modernité de son temps. A ses débuts, sans aucune incertitude dans ses choix plastiques (tel est le privilège des voyageurs sans passé et sans bagage), il emprunta certains éléments formels à Henry Moore, à S. W. Hayter de qui il fut l'élève de 1956 à 1958, à Max Ernst, à Paul Klee, mais pour aussitôt les transformer en un langage complètement autonome.
Car simultanément, il puisa aux sources offertes par les civilisations disparues, par les gravures rupestres, par ces dessins tracés sur les parois des cavernes, sur les armes, les outils et les bijoux trouvés dans les tombes de ces peuples né "avant" l'histoire. Il se fit le lecteur du palimpseste anonyme de l'humanité, traversant mers et continents pour aller voir de près les signes, les idéogrammes, les images à demi effacées de toutes ces cultures vivantes ou mortes intimement liées à la nature qui, bien que différentes d'elle, ne s'en sont pas encore séparées. Cultures dont les langages sont associés et supportés par la pierre, le métal, les gemmes et les ivoires, par l'écorce, la terre et le sable.
A ses yeux, il y avait une troublante parenté entre les arabesques qui ornent une épée scythe -ou une flèche bambara- et l'empreinte inscrite sur un caillou fossile par une fougère millénaire. C'est dans cette différence, à la fois absolue et infime, découverte entre les traces abandonnées par la nature et celles laissées par l'inscription humaine, qu'il faut situer le point de départ de sa recherche.
Son originalité consiste à avoir pensé un lien entre les deux, à avoir fait le rêve d'une culture qui fût enracinée dans la nature, ou d'une nature qui fût directement intelligence, mémoire, création. Et d'avoir ainsi tenté de trouver la racine même du langage, le point obscur d'où il surgit. Sur cette ligne de crête, il lui apparut que l'histoire lue dans les signes humains était le fragment, le sous-ensemble d'une immense histoire naturelle inscrite partout, et partout à décrypter. Le temps de la nature englobant le temps historique, dans un rapport qui restait à définir.
"On ne sait pas où commence l'abstraction, ni où elle finit" disait-il encore. "Mon travail n'est pas plus abstrait que la nature ne l'est. Pas plus qu'une algue se balançant dans l'eau. Pas moins que ce point doré que le soleil met dans les yeux d'une fille. Je ne saurais dire si cela se passe en moi ou en dehors de moi."
D'images en images, il a traqué ce mouvement particulier et toujours identique par lequel chaque forme vivante -qu'elle soit ou non de l'ordre du visible- se montre dans sa réalité spécifique pour aussitôt se constituer en signe, apparaissant comme le fondement de notre propre réalité psychique, faisant de celle-ci le reflet "parlé" du perpétuel spectacle que la nature met en nous.
Qu'il s'agisse du givre, d'une éclipse, du vent se levant au désert, des êtres à la fois anonymes et mythiques qui vivent au fond des forêts et des eaux, ou de ceux qui hantent les abysses de notre imagination, ces descriptions des phénomènes naturels sont toutes des objets mentaux se définissant par le regard de celui qui, les voyant, les rêve, et du même coup les nomme.
Fragments d'une réalité à la fois onirique et matérielle, les images de Roger Platiel nous entraînent vers nos continents perdus, nous désignant dans la splendeur des formes vivantes le berceau des mots oubliés et des paroles neuves.
Roger Platiel par Erich Erzog, historien d'art allemand.
Extrait du Catalogue du Staatlichen Kunstsammlungen de Kassel, première rétrospective de l'oeuvre gravé de Roger Platiel, janvier-février 1979.Tous ceux qui dans leur vie ont rencontré Roger Platiel gardent le souvenir d'un être essentiellement modeste, presque fragile, à l'ironie fine, légère, au regard rêveur et cependant brillant de fantaisie et d'imagination. On devinait derrière cet abord une volonté silencieuse, totalement tournée vers un seul but, mais aussi les cicatrices profondes laissées par un passé amer et douloureux.
La catastrophe historique qui frappa l'Allemagne en 1933 le contraignit à changer plusieurs fois de langue et de nation. Né à Paris en 1934 de parents allemands en exil, il grandit en Angleterre et en Suisse, puis revint en Allemagne où il acquit ses premières connaissances artistiques et pratiques dans l'art graphique.
C'est à Paris cependant que son art reçu son empreinte définitive, sous l'influence de Stanley William Hayter (né en 1901) qui dés 1927 y avait crée "l'Atelier 17". Chimiste de formation, Hayter s'est consacré à la recherche de nouvelles techniques d'impression. Dans le domaine de la gravure, "l'Atelier 17" fut l'un des laboratoires les plus réputés du 20° siècle. Son influence fut mondiale, s'étendant jusqu'aux Etats-Unis où Hayter transféra son atelier de 1940 à 1950.
C'est en 1956 que Roger Platiel entra chez Hayter, dans "l'Atelier" de nouveau installé à Paris. C'est là qu'il s'initia aux techniques de la gravure à l'eau-forte, qu'il développa par la suite dans un sens personnel. Il doit à Hayter l'un des traits fondamentaux de son style: le rythme et le jeu des courbes linéaires. Hayter était parvenu à ce langage linéaire et souple par l'abstraction des silhouettes humaines. La courbe et la ligne sont également les motifs de base du langage graphique de Roger Platiel, mais détachés de toute allusion à la figure humaine.
La luminosité des couleurs que l'on trouve chez Platiel, leur splendeur, leur éclat, leur expressivité fondée sur des contrastes richement nuancés, prennent indéniablement leur source dans la célèbre "Ecole de Paris" qui connut son apogée dans les années cinquante, lorsque Platiel travaillait à Paris. Si l'emploi de la couleur chez Hayter est plus abstrait, Alfred Manessier, Gustave Singier, Maurice Estève et Serge Poliakoff l'ont porté à sa plus parfaite intensité, sa plus profonde vibration.
Par ailleurs, on remarque chez Platiel, dans le style graphique proprement dit, une inscription dense et puissante, une finesse dans le détail, un "savoir faire" qui dévoile dans l'artiste un artisan. On y trouve des éléments de la tradition graphique germanique, enrichie et contrastée par des influences exotiques, extra-européennes. Certaines dispositions de couleurs témoignent de la trace laissée en lui par ses voyages au Mexique, au Pakistan, en Afrique.
Vers la fin des années cinquante, Platiel abandonne la représentation humaine. Il ne cherche plus à saisir l'individu, mais son essence - son espèce - comme on peut le voir dans l'oeuvre (d'ailleurs perdue) qui fut présentée à l'Exposition Internationale de Bruxelles.
Un autre exemple caractéristique est cet "Autoportrait", figuré par une stèle en demi-cercle, où veille un "oeil" unique. A travers le jeu des rythmes linéaires et des tons lumineux, l'individualité propre à ce "visage" surgit, avec son expression particulière, sans aucun recours au figuratif. Dans cette approche, les formes de la vie naturelle prennent pour lui une importance primordiale. La présence de la vie se manifeste partout à ses yeux, dans les plantes et les animaux, aussi bien que dans les pierres, les paysages, l'air et l'atmosphère qui les enveloppent.
Roger Platiel et un observateur infatigable et scrupuleux de la nature, ce qui n'apparaît pas à première vue.
Cependant, d'innombrables ébauches, des croquis au tracé strict et précis, saisissant l'essence des phénomènes naturels, en témoignent. L'eau-forte en couleurs achevée, telle qu'elle se présente à nous, est en fait la "traduction poétique" dans le langage des formes et des couleurs, de ces dessins d'après nature. La forme naturelle initialement observée se métamorphose en une image aux sens énigmatiques et multiples. La recherche de l'artiste ne vise pas à développer des structures picturales à partir de formes, ou de spectacles naturels, ni à les refléter en termes de lois universellement reconnues, comme on peut le voir chez Fritz Winter, qui succéda dans cette voie à Kandinski et à Klee.
Ce que cherche à saisir Platiel, c'est le secret même de la nature, son essence sous son apparence, sa beauté et la multiplicité de ses significations, considérés comme objet de son organisation picturale.
En comparant les oeuvres produites au cours des vingt années de travail de l'artiste, on constate une modification évolutive dans la structure et l'espace. Mises à part les gravures du début des années cinquante, les premières oeuvres sont plus planes, plus abstraites, plus imprégnées de linéarité que celles qui suivirent. Les eaux-fortes ultérieures deviennent plus concrètes, et leur espace intérieur s'approfondit. La forme générale se déploie dans un sens plastique concentré jusqu'à devenir presque monumentale, tout en étant plus simple, plus stricte, et en même temps plus grande.
A la vision "informelle" des premiers temps succède une certaine expression figurative, bien qu'énigmatiquement fermé, de la réalité d'un rêve parfaitement saisi.
Si l'on remarque cette indéniable et progressive évolution vers une approche des phénomènes représentés, simultanément condensée et monumentale, on ne peut pas ne pas être frappé, dès les premières gravures, par une perfection et un fini qui ne se démentirent jamais.
Depuis la première ébauche sur la planche jusqu'au ciselage du moindre détail, Platiel travaille à la manière d'un orfèvre un objet qui n'est pas perdurable. Il n'est pas étonnant, ainsi, que la planche elle-même, plus que son empreinte, s'institue en oeuvre d'art définitive (Hommage à Cassel, 1977).
En emportant Roger Platiel, la mort nous a privé d'un artiste original et lucide, alors qu'il arrivait au faîte de son talent, à l'apogée d'une création à laquelle peu d'oeuvres gravées de notre siècle peuvent être comparées.
Six graveurs de l'Atelier 17par Robert Marteau, écrivain et poète, mort en 2011.
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L'oeuvre de Roger Platiel, prématurément close par la mort, apparaît au néophyte marquée d'une jeune puissance, d'une force contenue que nourrit l'attention, que la précision conduit. On y voit la représentation s'estomper au profit de la « tactilité » dans un rythme venu des profondeurs où la ligne et la mise en lumière des couleurs se marient.
Ainsi chaque planche nous devient-elle présente comme phase concrétisée d'un courant nocturne dont l'auteur même n'a pas le secret.
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Roger Platielpar Stanley William Hayter, peintre-graveur, créateur l'Atelier 17 en 1933, atelier qu'il dirigera jusqu'à sa mort en 1988.
Texte écrit en février 1971 pour l'exposition de Roger Platiel à la Galerie Guilhem Mellier à Paris.Roger Platiel est français, mais un de ces français explorateurs qui voyagent de par le monde plutôt que de ceux qui se contentent de passer leur vie tranquillement chez eux. Eduqué dans plusieurs pays d'Europe, il a beaucoup voyagé et s'est ainsi enrichi au contact des peuples primitifs, en particulier de l'Afrique.
Son oeuvre qui utilise les moyens les plus recherchés de la gravure moderne reflète un monde primitif. Ce qui ne veut pas dire sauvage. L'homme primitif, hors de tout cet appareil que notre civilisation engendre et multiplie pour finalement nous éloigner de la vie, se sert de son « art » pour s'y intégrer. Comme celle de Roger Platiel, son image agit directement sur son monde, par les moyens que nous avons appris à appeler envoûtement et fétichisme.
Stanley William Hayter Ă©crivait Ă©galement, en 1976, Ă propos de Roger Platiel :
L'art de Roger Platiel est à l'évidence biologique et nous offre l'image de formes organiques. Mais que celles-ci soient marines ou pélagiques, elles ne procèdent nullement d'organismes aquatiques ou océaniques tels que nous les connaissons.
Le procédé mis en oeuvre dans ses gravures favorise curieusement l'imagination, l'entrainant loin de son point de départ initial. Par son travail sur la planche, qui lui propose une multitude de couleurs et de textures possibles, l'artiste se trouve engagé dans une série de détours quelquefois éloignés de son intention initiale.
Cela explique peut-être l'étrange affinité de Roger Platiel avec des formes organiques inconnues de la science. L'esprit devient en lui-même un organisme marin, qui en disponibilité au sein d'anciennes mers, se fait le miroir de vivantes espèces marines. Ces créatures flottent en suspension dans un médium opalescent, dans lequel la rêverie du spectateur dérive à son tour.
Roger Platiel - gravures
par Alan Chatham de Boliva, critique d'art.
Extrait de l'article paru dans « Art & Métiers du Livre » n°161 de Mai/Juin 1990. . . . . .
Son oeuvre, bien que marquée par des influences aussi diverses de celles de Klee ou Hayter, possède une qualité proche de ce réel merveilleux dont parle Alejo Carpentier, le grand poète cubain, ce n'est peut-être pas un hasard si Platiel ayant connu plusieurs lieux d'exil avant de se fixer définitivement à Paris en 1955, grava ses lieux d'errance dans ces planches que semblent dévorer une lave en fusion, un trop plein sanguin, une effervescence végétale, des craquements de terrain par temps de sécheresse. Une oeuvre tantôt abstraite, quasi figurative où les éléments, quand ils se donnent, résistent encore avec une obstination surréaliste. Platiel va chercher au fond des consciences enfouies dans le creux de l'histoire humaine, depuis les traces préhistoriques jusqu'à la découverte du Cosmos et à la marche sur la lune, transfigurant le tout sur la plaque, donnant des colorations presque barbares à ces images qui agissent d'une bien étrange manière. Et pour qui veut bien voir pour reprendre une phrase favorite des surréalistes : « Vous qui ne voyez pas, pensez à ceux qui voient » ; et sa pensée humaniste, comparatiste certainement, s'étire dans un rêve obscur quelquefois, illuminé toujours du dedans.
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Feu ardent au coeur de centres cachés
par Traudel Buck-Widmann, critique d'art allemand.
Extrait de l'article paru dans le « Offenbach Post » le 7 novembre 1973
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Lorsque l'observateur essaie de pénétrer le contenu des gravures de Roger Platiel, par delà l'immatérielle perfection de ses estampes précieuses, en deçà d'un univers de forme clos sur soi éclairé par les titres, il se trouve confronté à un grand de l'art pictural au service de l'idée de l'individualité. L'art de Roger Platiel est au delà de la figuration aussi bien que de l'abstraction comme on les comprends communément.
L'empreinte personnelle toujours reconnaissable par laquelle l'événement de la forme créé s'impose, est la qualité la plus impressionnante et la plus enthousiasmante pour celui qui regarde.
Embrasées, et pareil à des lumières cachées au coeur de foyers irradiés, les couleurs de la palette créent un ensemble de formes qui déterminent un espace tantôt englobant, tantôt déployé vers l'extérieur, tantôt silencieusement suspendu.
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Beauté pure! Il va de soi que dans un tel talent, la technique, l'écriture, la texture, les couleurs merveilleusement nuancées, surtout les valeurs intermédiaires, l'organisation de la composition, l'ambiguïté des contours qui se transforment, se prolongent toujours en fonction de l'ensemble, tout concourt à la beauté et à la maturité de l'oeuvre.
Extrait d'un interview de Roger PlatielInterview télévisé donné le 8 octobre 1976 à La Valette, Malte."
Je cherche à décrire les rapports internes de la matière. La manière dont une multitude de petits éléments sont imbriqués les uns dans les autres pour constituer un tout . . . du moins, la manière dont ce processus apparait à l'homme.
Mon travail est abstrait, mais ni plus ni moins que ne l'est une algue se balançant dans l'eau, ou que ce point doré qui brille dans les yeux d'une fille. La beauté est dans toute chose. Elle disparait quand l'homme oublie que son origine est dans la nature, et le lien qu'il garde avec elle.
Je considère qu'une grande partie de ma tâche est achevée lorsque le spectateur perçoit dans mon travail la quête de la beauté, mais ce n'est pas tout. Je souhaite qu'on voit dans mes gravures des choses dont je n'avais pas eu clairement conscience, dont j'ignorais la présence. Alors je suis content! Mon travail atteint pleinement son but lorsqu'il touche chez l'observateur une corde sensible, lorsqu'il devient le détonateur d'une réaction en chaîne et déclenche la parole."
Le guetteur immobile
de Claire Bonnafé, roman publié aux Editions Balland, Paris en 1990, puis par les Editions Livres de Poche (n° 4323), Paris en 1992.Il s'agit ici d'un roman qui valut à l'auteure le grand prix 1991 des lectrices de « Elle ». Largement inspiré par la vie de Roger Platiel, qui prend ici les traits de Franz, l'ouvrage est à la fois une métaphore de la mémoire et la quête d'un passé disparu.
Bien que « Roman », il nous a paru important d'indiquer cette piste de lecture pour une meilleure approche à la fois de l'homme et du graveur Roger Platiel. Il s'agit, quoi de plus normal, d'une approche de l'artiste sous la vision d'un seul regard et d'un unique ressenti, celui de l'auteure qui fut plusieurs années la compagne de l'artiste. A biens des égards, ce regard permet souvent de côtoyer Roger Platiel, « à postériori », de l'accompagner dans l'un ou l'autre de ses voyages, qu'ils soient réels ou fictifs, ou de ses sentiments.En voici un résumé succinct :
Après la mort de Franz, son compagnon peintre, Laura s'attache à réunir les éléments d'un catalogue d'exposition. Mais quand il s'agit de son enfance, elle se heurte à la résistance de la mère de Franz.
Elle parviendra néanmoins à reconstituer un cheminement : envoyé en Angleterre pour échapper au nazisme, mis ensuite en pension par des parents pour lesquels il est devenu insaisissable, Franz, alors adolescent, a tenté de se suicider. Une balle est restée dans sa tête, inoffensive, mais sans qu'on puisse la retirer : symbole d'une mort présente, comme en suspens.
Articles de presse
Cette
rubrique rassemble un grand nombre d'articles parus à différentes périodes du parcours artistique de Roger Platiel. La plupart est en relation avec des expositions personnelles ou collectives de l'artiste, en France ou à l'étranger. Si plusieurs articles sont en langue française, on découvrira des articles écrits en langue allemande ou anglaise, Roger Platiel, qui parlait parfaitement ces trois langues, ayant souvent exposé à l'étranger ; nous avons choisi de ne pas en donner les traductions. L'ensemble présenté ici n'est bien sûr pas exhaustif. Comptes-rendus de fond de critiques d'art après la visite d'une exposition, ou simples entrefilets de presse, nous n'avons pas souhaité établir de hiérarchie dans notre présentation.
On trouvera également quelques autres publications concernant l'artiste, mais aussi, lorsque cela a été possible, quelques photographies prises au cours de tel ou tel vernissage d'exposition. Il va de soi que cette rubrique pourra être complétée par de nouveaux éléments dont nous aurions connaissance ultérieurement.
1961Exposition au Kasseler Kunstverein, Kassel, Allemagne
Kasseler Post 21/01/1961Kasseler Post 23/01/1961Exposition d'affiches de films d'Ă©tudiants de l'Ecole des Beaux-Arts, Braunschweig
Frankfurter Allgemeine Zeitung 20/12/1961
1962Publication du "Die Graphik des 20. Jahrhunderts" von Wolf Stubbe, Rembrandt-Verlag, Berlin
Die Graphik des 20. Jahrhunderts, page 2921963Exposition Hans Leistikow au Kasseler Kustverein, Kassel, Allemagne
KasselerPost 22/09/1963 (1)Kasseler Post 22/09/1963 (2)
Exposition Ă la Galleria La Cittadella, Ascona, Suisse
SĂĽd Schweiz 29/08/1963SĂĽd Schweiz 31/08/1963
1964Exposition Ă la Galerie Lometsch, Kassel, Allemagne
Hersfelder Zeitung 12/08/19641965Exposition au National College of Arts, Lahore, Pakistan
Pakistan Times 05/05/1965Pakistan Times 16/05/1965Pakistan Times 17/05/1965Pakistan Times 18/05/1965Pakistan Times 21/05/19651966RĂ©sidence d'artistes Ă la Villa Massimo, Rome, Italie
Bonner General Auz 19/04/1966 Kasseler Post 23/04/19661966Exposition au Nassauischer Kunstverein, Wiesbaden, Allemagne
Wiesbaden Kurier 25/09/1967 (1)Wiesbaden Kurier 25/09/1967 (2)1968Exposition au Kunstkabinett Offenbach, Offenbach am Main, Allemagne
Offenbach Post 22/11/1968 & 25/11/1968Offenbach Post 26/11/1968Offenbach Post 28/11/1968
1969Exposition au Centre Culturel Franco-VoltaĂŻque de Ouagadougou, Haute-Volta (Burkina Faso)
Photographie du vernissage 15/03/1969 . L'artiste fait découvrir ses gravures à l'ambassadeur de France.
1970Exposition au Kasseler Kunstverein, Kassel, Allemagne
Esslinger Zeitung 20/01/1970
1973Exposition au Kunstkabinett Offenbach, Offenbach am Main, Allemagne
* >Offenbach Post 07/11/731976Exposition Ă la Galerie Eiko, Paris
Photographies du vernissage de l'exposition 03/02/1976 . On peut reconnaître les trois autres graveurs qui partageaient
l'exposition : Isolde Baumgart, Gail Singer et Hector Saunier.
Exposition Ă la Nora Art Gallery, Jerusalem, Israel
* > JĂ©rusalem Post 09/04/1976Exposition au National Museum of Fine Arts, Valetta, Malte
Times of Malta 05/10/1976Photographies de l'interview télévisé à la TVM Malta le 08/10/1976 . Ces prises de vue ont été faite dans le studio d'enregistrement.
1979Les affiches des élèves de l'Ecole des Beaux-Arts Kassel (années 1958-192)
"Ein Plakat ist eine Fläche, die ins Auge springt" de Hans Hillmann et Gunter Rambow, Ed Zweitausendeins, Francfort / R. Platiel, pages 214 & 215.
1980
Parcours d'un "Voyageur astral"
Les Nouvelles de l'Estampe, Claire Bonnafè, n°49, janvier-février (Lire en rubrique "Ecrits")
Exposition au Musée des Beaux-Arts de Mâcon
JSL (Journal de Saône-et-Loire) édition Mâcon 12/06/1980JSL (Journal de Saône-et-Loire) édition Mâcon 18/06/1980
1981Exposition "Epreuves d'artiste", Centre Culturel d'Argenteuil, France
Les Nouvelles de l'Estampe, n°57, mai-juin 1981Le Parisien 06/03/1981 1990Exposition à la Galerie Le Cube, Paris
* >Revue "Art et Métiers du livre", A. Chatham de Bolivar, n°161, mai-juin, pages 64 & 65
Les matrices
Il nous a semblé intéressant de regrouper ici l'ensemble des matrices que nous avons pu retrouver à ce jour. Elles sont au nombre de 19* et correspondent donc à peu près à 10% de l'ensemble des matrices gravées par Roger Platiel. S'étalant sur les vingt années de création graphique de l'artiste, elles ont été les support de gravures de différentes époques : 1957 pour la première (« Nocturne », n°7 du présent catalogue raisonné) et 1978 pour la dernière (« Sans titre XIII », n°177 du présent catalogue raisonné).
Cuivres ou zincs, laissées à l'état brut ou mises en couleurs (encrées et vernis) par l'artiste après le tirage complet des épreuves, on y retrouve les attaques de l'acide et le trait gravé toujours maîtrisé de l'artiste.
Si la plupart des matrices ont aujourd'hui malheureusement disparues, la presque totalité de l'ensemble restant est conservé par Me Claire Bonnafé-Laurent, un zinc faisant partie de la donation de Mme Nora Platiel au Musée Schloss Wilhelmshöhe de Kassel en 1979 («
Le gros méchant » de 1958), un dernier cuivre, de la collection R. Schaper («
Un habitant des profondeur » de 1974). Pour celui-ci, nous reproduisons la lettre des recommandations de l'artiste à son ami, Willi Schaper, lorsque ce dernier fit l'acquisition de la matrice, ainsi qu'une photo du jour où Roger Platiel la lui remis à Kassel.
* pour 20 différentes gravures, le cuivre de la gravure n°12 («
Dreamboat I » de 1959) ayant été réutilisé pour la gravure n°25 («
Dreamboat II » de 1960).
De haut en bas et de gauche Ă droite :Cuivre de "Nocturne" (
n°7 de 1957)
Cuivre de "L'oiseau ou Poule céleste" (
n°9 de 1957)
Zinc de "Le gros méchant" (
n°11 de 1958 / Collection Musée de Kassel)
Cuivre de "Dreamboat I" (
n°12 de 1959 / Nota : cuivre ayant servi pour la gravure n°25, "Dreamboat" de 1960)
Cuivre de "Carne" (
n°22 de 1960)
Cuivre de "Christine aux rivages de Suède" (
n°24 de 1960
)Cuivre de "Dreamboat" (
n°25 de 1960 / Voir cuivre de "Dreamboat I")
Cuivre de "Dalmatie" (
n°34 de 1961)
Cuivre de "Elle part dans la vie" (
n°122 de 1973)
Cuivre de "L'Argonaute ou Vol" (
n°135 de 1974 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)
Cuivre de "Le maître des fougères" (
n°136 de 1974 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)
Zinc de "Un habitant des profondeurs" (
n°139 de 1974 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet / Collection R. Schaper)Cuivre de "Affinités électives" (
n°141 de 1974
)Cuivre de "Caparaçon ou Cible" (
n°143 de 1974 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Un héros contemporain" (
n°149 de 1975 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Andros" (
n°152 de 1975 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Un rêve d'ailes" (
n°159 de 1976 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Vent dans le désert" (
n°169 de 1977 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Orage sous les tropiques" (
n°172 de 1977 /
Le cuivre a été encré et verni par Roger Platiel après le tirage complet)Cuivre de "Sans titre XIII" (
n°177 de 1977
)En cliquant sur les images vous les ferez apparaître en grand format.
Presse et matériels
Roger Platiel acheta sa presse, d'occasion, à l'Abbaye de Cluny en 1962. Il s'agit d'une presse taille douce fabriquée par les Ateliers Ledeuil à Paris. Cette même année, l'artiste l'installa à Cachan, dans son tout premier atelier. Elle était encore là , près de lui, à Paris, dans l'appartement où il rendit l'âme, le 20 juin 1978. Après sa disparition, elle fut donné à l'Atelier 17 qui deviendra plus tard l'Atelier Contrepoint à Paris (
10 rue Didot - 75014), où elle est encore. Toujours alerte, malgré son grand âge, elle est utilisée quotidiennement par les graveurs qui fréquentent l'atelier et notamment par les élèves venues du monde entier s'initier à la technique de "
la couleur simultanée", inventée par Stanley William Hayter et qui révolutionna le monde de la gravure.
Voici quelques goujes ayant appartenues à l'artiste. On remarque, comme il est d'usage parmi les graveurs, que Roger Platiel en a gravé les manches en bois de ses initiales. Sur cette autre image, le regroupement de quelques ustensiles dont l'artiste se servait régulièrement, notamment son couteau.
Roger Platiel, comme nombre de graveurs, consignait en détail de multiples renseignements pour chacune de ses gravures. Il utilise un petit carnet (des petits carnets?) à feuillets quadrillés pour écrire ce qu'il considère comme « la mémoire » de chacune de ses gravures.
Le carnet dont vous allez pouvoir tourner les pages (
*) est le seul carnet de l'artiste retrouvé. En existait-il d'autres? Nous ne savons le dire. Il s'agit ici d'un carnet de petit format (13 x 20,6 cm), avec pages à petits carreaux et dont l'artiste a numéroté toutes les pages (de 1 à 190).
Nous avons décidé de montrer uniquement les pages écrites soit :
* de la page 1 à la page 18-19 (après un bref sommaire, pages concernant l'aspect technique de 18 différentes gravures),
* de la page 40 à la page 91 et de la page 100 à la page 102 (pages concernant l'état des ventes et des dépôt de gravures), pour lesquelles nous avons choisi - afin d'éviter une surcharge du document - de ne montrer que 14 pages (pages 40, 41 et 72 à 83),
* de la page 150 à la page 155 (répertoriant un ensemble d'adresses de galeries, de clients, de fournisseurs divers, etc, puis deux listes d'envois de gravures),
* et enfin de la page 174 à la page 177, puis de la page 186 à la page 190 (répertoriant également des adresses de galeries, de clients, de fournisseurs divers, etc, puis différentes notes).On découvrira, en ce qui concerne les notes techniques propres aux gravures elles-même (de la page 3 à la page 18) - les notes qui nous paraissent le plus intéressantes -, qu'il s'agit d'annotations prises par l'artiste sur le vif au cours du processus de tirage des planches, les traces d'encres et d'empreintes en sont les témoins. Parfois les notes prises pour deux gravures différentes sont inscrites sur une même page. Après le titre, on peut trouver l'année de réalisation, la taille du cuivre utilisé, le tirage auquel il pense, la nature du papier, les couleurs employées et les techniques. Parfois, ces pages sont enrichies d'un minuscule croquis. L'artiste peut également y consigner, cette fois à postériori, une sorte de petit historique de sa planche : où et quand a-t- elle été exposée. L'artiste peut noter les exemplaires vendus, ceux qu'il a offert, ou encore l'adresse de la galerie où une épreuve a été laissée en dépôt.
Les aspects purement techniques de ses notes pourront, bien évidemment, lui servir ultérieurement pour la création d'une autre gravure ; il n'est en effet pas rare de voir apparaître, au fil des pages consacrées à de nouvelles gravures, des références à des gravures réalisées des années auparavant.
On sait que Roger Platiel considérait que chaque épreuve tirée d'un même cuivre était unique et, à ce titre, il notera soigneusement les couleurs utilisées pour chacune des différentes versions.
* Après avoir cliqué sur la couverture noire du carnet, vous pourrez tourner ses pages avec votre souris en faisant un cliquer-glisser (ou en cliquant directement) dans l'angle inférieur droit du document.
Photos de l'artiste
Cette
rubrique rassemble quelques photographies de l'artiste dans son atelier (et logement) du 86 de la rue Charonne, dans le XIème arrondissement de Paris. Les photographies de Roger Platiel lors de différentes phases de son travail de graveur (graver, imprimer, régler sa presse, encrer, etc) sont prises en 1974 - lors du tirage de la gravure "
Une vie libre" - par son ami, le graveur Hector Saunier, dont il avait fait la connaissance bien des années auparavant en poussant la porte de l'atelier de Hayter. En quittant l'Atelier 17, Roger Platiel avait
monté son tout premier atelier personnel à Cachan en 1962, mais plusieurs années avaient maintenant passé. Roger Platiel cherchait de nouveau à avoir son propre atelier, et après que son ami Takesada Matsutati, le graveur japonais, lui ait prêté le sien (Impasse de la Bonne-Graine, XIème arrondissement) le temps de son été 1972 prolongé au Japon, l'artiste allait enfin trouver son bonheur dans le quartier du Père Lachaise. Ce local d'une centaine de m2 a été trouvé par l'artiste en 1973 et il s'y installe en juillet de cette même année. Ancien atelier de confection très impersonnel, mais magnifiquement éclairé de deux longues verrières, il va y installer sa presse et organiser un lieu de travail à sa main. Le local est pour plus de 80% dédié à la gravure, l'artiste s'autorisant quelques petits espaces pour sa vie de tous les jours (cuisine, salle d'eau, chambre). Espace de vie, espace de travail, c'est là qu'il passa les cinq dernières années de sa vie, dessinant, imaginant, rêvant, gravant, tirant ses planches, dormant, aimant ; c'est là qu'il rendit l'âme, le 20 juin 1978, le visage à presque toucher sa presse.
Mark Antman
Photojournaliste indépendant, le photographe new yorkais Mark Antman a fait de très nombreux séjours en Europe et en Afrique dans les années 70. Grâce à l'introduction de l'une des tantes de l'artiste, immigrée à New York, il va à la rencontre de Roger Platiel au cours de l'hiver 1977-1978 dans son atelier de la rue de Charonne à Paris. L'artiste est déjà malade et il n'est pas temps d'en perdre, une amitié réciproque et quasi instantanée s'établira dès leur première rencontre. Le photographe apprécie le travail de l'artiste, et il entame avec son accord de longues séances de photographie des gravures de son hôte sur plusieurs jours de travail. Marc Antman est un professionnel ; il prend des clichés pour étalonner ses gris ou ses couleurs. Les gravures sont installées sur un fond neutre posé presque à la verticale sur un chevalet de bois. Les verrières qui courent sur l'un des côtés de l'atelier permettent un éclairage naturel et diffus optimum, aidé par l'installation d'un parapluie photographique qui adoucit encore la lumière.
L'essentiel de ses photographies sont prises en noir et blanc avec des pellicules 24x36 Ilford (Extra fine chain - Panchromatic). Les images sont doublées, parfois triplées par sécurité. Quelques gravures sont également photographiées avec des pellicules couleurs (HS Ektachrome Film). Enfin, d'autres sont prises avec un appareil photographique différent et dans un format 6x6 couleur (Kodak safety film).
Roger Platiel est fatigué et il est souvent allongé sur son lit. Ne lui a-t-on pas loué une télévision pour briser un peu de ce temps qui s'écoule? Mark montre les planches de contact de ses photographies à Roger. Un choix s'établit et de petites croix au crayon rouge sont tracées directement sur les planches de contact, mettant ainsi en évidence les clichés qui seront tirés. Cela sera fait, le plus souvent en plusieurs exemplaires.
Viendra le temps du départ de Roger et Mark en sera véritablement très affecté.
Quelques années plus tard, en 1983, Mark Antman sera de retour définitivement aux Etats-Unis. Il co-fonde (avec Alan Carey) une agence de presse, « The Image Works » ; après des débuts extrêmement modestes, l'agence devient l'une des plus importantes agences indépendantes de photo spécialisées dans l'imagerie éditoriale et l'information aux États-Unis. Elle regroupera vite plusieurs dizaines de milliers de clichés, dans des domaines aussi différents que l'éducation, la culture, l'art, l'industrie, l'architecture, l'écologie, etc.
En 2001, il en deviendra l'unique propriétaire et le président. Après toute une vie dans ce domaine, il reste passionné par tous les aspects de la photographie, en particulier en tant que moyen de communiquer des sentiments, des informations et des idées.
Lorsque, à la demande de Nora Platiel, Mme Claire Bonnafé-Laurent établira en 1978 le répertoire exhaustif de l'ensemble des gravures présentes dans l'atelier au décès de l'artiste (1039 planches pour 138 gravures), elle notera minutieusement lorsque telle ou telle gravure a été photographiée par Mark Antman (
Nota : Information que vous retrouverez dans les "Commentaires" de chaque gravure lorsqu'il y a lieu). Lorsque c'est le cas, des photographies de tout petit format des estampes seront d'ailleurs collées sur les pages réservées aux gravures correspondantes.
Bien que l'ensemble de l'oeuvre n'ait pas été photographié - comment aurait-il pu l'être à l'hiver 1977-78? - , il s'agit là d'un archivage photographique de toute première importance puisque plus d'une centaine de gravures ont été photographié par Mark Antman.
Ci-dessus, une petite partie des tirages argentiques des photographies de Mark Antman, ainsi que deux planches de contact (à gauche). On peut reconnaître parmi cet ensemble quelques unes des gravures de Roger Platiel : «
Boris » de 1965, «
Antogonisme IV » et «
Antogonisme V » de 1966, «
Arlequin » de 1967, «
Scindé » de 1969, «
Le songe de Cortez » de 1974, «
Andros » de 1975 ou encore «
Concession peul » de 1978. Sur la droite, l'ensemble des négatifs des photographies, noir et blanc ou couleurs en format 24x36 et couleur en format 6x6.
Remerciements
Ce catalogue raisonné a nécessité l'aide précieuse d'un grand nombre de personnes, toutes de bonne volonté, qui m'aidèrent à sa réalisation par leurs conseils judicieux, le prêt de gravures et documents en leur possession. Pour certains, le partage de souvenirs personnels fut inappréciable, me permettant sans aucun doute une plus grande proximité avec l'artiste et m'ouvrant à une meilleure compréhension des thèmes abordés dans son oeuvre gravé.
Je tiens tout particulièrement à remercier
Mme Claire Bonnafé-Laurent, dernière compagne de l'artiste, qui fut à l'origine de ce travail et qui m'a ouvert à la fois toutes les portes et . . . ses cartons, avec grande gentillesse. En outre, elle m'a confié, en confiance, le répertoire des oeuvres contenues dans son atelier qu'elle a établi juste après la disparition de Roger Platiel. Ce travail précieux me fut d'une très grande utilité, comme il le fut, en son temps, à Mr Erich Herzog pour établir le " Das druckgraphische Werk " (pour le Staatlichen Kunstsammlungen de Kassel en Allemagne). On comprendra aisément que ce premier travail de 1979 qui tentait de répertorier toutes les gravures de l'artiste me fut d'une aide considérable,
Mme Suzy Platiel-Benguigui, qui fut de longues années l'épouse de l'artiste, pour son gentil accueil, pour m'avoir également permis de photographier toutes les gravures en sa possession et m'avoir ouvert "la boîte aux souvenirs",
Mr Hector Saunier, très proche ami et complice de Roger Platiel ("un frère!"), graveur, ancien collaborateur de Stanley William Hayter et aujourd'hui co-directeur de l'Atelier Contrepoint à Paris, pour son aide pleine de délicatesse et pour ses encouragements, pour ses prêts, pour le partage de ses si précieux souvenirs avec l'artiste - n'ont-ils pas, tous les deux, passé des heures côte à côte dans l'atelier ou échaffaudé un monde plein de rire autour de la table d'un petit restaurant de la rue Daguerre? -,
Le Musée Staatlichen Kunstsammlungen de Kassel en Allemagne et tout particulièrement Mme Christiane Lukatis - conservatrice de la collection des estampes (Graphische Sammlung) -, m'ouvrant dans sa totalité le fonds Roger Platiel, qui m'a permis de travailler (photographier et décrire) sur l'ensemble des gravures de l'artiste (179 références) faisant partie de la Donation de Mme Nora Platiel en 1979, travail qui m'a donné l'occasion non seulement de découvrir plusieurs gravures jusque là inconnues, mais aussi un grand nombre de variantes de couleurs de gravures déjà connues,
Le Dr Thomas Nowotny, petit cousin de Roger, et sa famille, qui nous reçurent à Stephanskirchen, au sud de Munich, avec simplicité et la plus extrême gentillesse. « Tom » mit à notre entière disposition l'importante collection de Lisa Nowotny, sa maman. Nous avons pu y découvrir quelques trésors jusque là encore inconnus,
Mme Lisa Nowotny, sa maman et cousine de Roger (de 7 ans son ainée), qui, enfant, connut aussi le chemin de l'exil danois à l'Ecole d'Östrupgaard, puis celui qui la mena plusieurs années en Angleterre. Ayant toujours soutenu Roger, ses yeux étaient à l'évidence heureux de pouvoir parler de lui et d'échanger avec nous quelques souvenirs du passé,
Mr Ralf Schaper, fils de Mme Else et de Mr Willi Schaper - ami et protecteur de Roger -, sans lequel notre séjour à Kassel n'aurait pu être si parfaitement accompli. Son émotion à fleur de peau à nous expliquer l'histoire de Roger et de sa famille en la replaçant dans la grande Histoire nous a non seulement ouvert à une meilleure compréhension de l'artiste, mais aussi à en prendre la mesure au travers de la période allemande si noire et douloureuse des années 30 et 40. Après nous avoir fait connaître la collection des gravures que lui a léguée son père, Ralf s'est appliqué à nous faire visiter tous les lieux qui sont rattachés à Nora, Hermann et Roger Platiel,
La Bibliothèque Nationale de Paris, et tout particulièrement, pour son accueil et ses encouragements, Mme Cécile Pocheau Lesteven, Conservatrice en chef du département Estampes et Photographies qui m'a permis de consulter l'ensemble des gravures de l'artiste faisant partie de la Donation de Mme Claire Bonnafé-Laurent en 1980,
Mrs, Guillaume Doligez (collectionneur), Guilhem Mellier (ancien galeriste à Paris qui exposa Roger Platiel en 1971), Felipe Garate (neveu d'un collectionneur argentin, dont la collection fut exposée en 1997 à Buenos Aires), Pierre-François Albert (galeriste à Paris), Jim Monson (graveur qui, avec Isolde Baumgart son épouse, partagea une amitié avec Roger Platiel), Mme Désirée Moorhead-Hayter qui a eu l'extrême gentillesse d'un prêt et du partage de ses souvenirs avec l'artiste,
Mr Michel Amiot, mari de Claire Bonnafé-Laurent, pour sa gentillesse, pour son aide patiente et enthousiaste, pour avoir toujours su créer - dans la discrétion - les meilleures conditions de nos heures de travail, à Granié, comme à Paris,
Michelle, mon épouse qui m'aida, patiemment et en de maintes occasions, à faire les photographies des gravures et à en établir la description précise. Quelques uns des ouvrages de son immense bibliothèque de près de 500 catalogues raisonnés consacrés à l'estampe m'ont été également d'un très riche enseignement,
L'équipe de m.champetier.com dans son ensemble, Julie, Stéphanie, et tout particulièrement Kim, notre ami ingénieur, qui a su construire une base de données claire et efficace qui m'a permis de bâtir le présent catalogue raisonné.
J'ai bien sûr une pensée pour Mr Arsène Bonafous-Murat, collectionneur et marchand d'estampes disparu en 2011, puisque, comme je l'ai écrit dans ma présentation, c'est dans la vitrine de sa galerie parisienne, au 15 rue de l'Echaudé (VIéme), que pour la première fois je vis exposées des gravures de Roger Platiel et qu'il me donna quelques renseignements sur l'artiste. Quelques années plus tard, c'est dans sa seconde galerie, au coeur de la cité médiévale de Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn et Garonne), que je pus visiter la très belle exposition de gravures qu'il organisa à l'été 2007.
Je ne peux oublier l'artiste lui-même. Jeune, il se rêvait entomologiste, il sera graveur. J'ai essayé, dans la mesure de mes connaissances et me mettant à son service, de donner la vision la plus large possible non seulement de son oeuvre gravé, mais aussi de sa vie d'homme, difficile par bien des aspects. Ce long travail a été réalisé sous son regard, un beau portrait en noir et blanc posé sur ma table de travail. J'aime ces échanges de regards silencieux qui nous unissent désormais. Que l'on en ait conscience ou pas, tous les chemins se croisent un jour ou l'autre! Patrick BertrandIndex des noms cités dans le catalogue raisonné
Antman Mark
Photojournaliste indépendant, le photographe new yorkais Mark Antman a fait de très nombreux séjours en Europe et en Afrique dans les années 70. Grâce à l'introduction de l'une des tantes de l'artiste, immigrée à New York, il va à la rencontre de Roger Platiel au cours de l'hiver 1977-1978 dans son atelier de la rue de Charonne à Paris. L'artiste est déjà malade et n'aura plus que quelques mois à vivre. Le photographe apprécie le travail de l'artiste, et il entame avec son accord de longues séances de photographie des gravures de son hôte. Mark Antman est encore présent à Paris lorsque l'artiste disparaît.
En 1983, Mark Antman fait un retour définitif aux Etats-Unis. Il co-fonde une agence de presse, « The Image Works » ; après des débuts extrêmement modestes, l'agence devient l'une des plus importantes agences indépendantes de photo spécialisées dans l'imagerie éditoriale et l'information aux États-Unis. En 2001, il en deviendra l'unique propriétaire et le président. Après toute une vie dans ce domaine, il reste passionné par tous les aspects de la photographie, en particulier en tant que moyen de communiquer des sentiments, des informations et des idées.
Un sous-chapitre d' « Index » (« Mark Antman ») lui est consacré.
Baumgart IsoldeIsolde Baumgart est né à Munich (Allemagne) en 1935. Elle fera ses études à Berlin, puis à Kassel. Elle se passionne pour la gravure. Etudiante à l'Ecole des Beaux-Arts de Kassel, comme lui, elle se liera d'amitié avec Roger Platiel qui restera son ami jusqu'à sa disparition en 1978. Elle suivra le même chemin que lui et viendra à Paris pour apprendre encore de la gravure dans le célèbre Atelier 17 de Stanley William Hayter. C'est là qu'elle rencontre le graveur américain Jim Monson, qui deviendra, en 1973, son mari pendant près de quarante ans. Isolde Baumgart disait : «
Hayter avait une démarche tout à fait expérimentale. Au lieu de reproduire une image connue ou un sujet réaliste, le maître nous encourageait à exprimer nos émotions ou états d’âme par des projets abstraits. Il disait : "Si vous savez d’avance de quoi votre image aura l’air, ce n’est pas la peine de la réaliser. Le travail abstrait, c’est l’aboutissement de nos états d’âmes et de notre sensibilité sur papier." ». Au fil des ans, on retrouvera la signature d'Isolde Baumgart sur de nombreux et magnifiques timbres de la Deutsche Bundespost (Postes allemandes), dont elle sera l'un des graveurs pendant plusieurs décennies, sur des affiches de différents événements (foire de Munich, Bicentenaire de la Révolution française, ...) ou pour le cinema et la publicité. Elle avait à peine trente ans lorsqu’elle commencera à enseigner au Centre américain de Paris ; elle donnera également un enseignement à l’université du Connecticut, à la Merz Akademie de Stuttgart ou à l’université de Kassel. Membre de l’Alliance graphique internationale (AGI), elle exposera personnellement en Europe - partageant parfois l'affiche avec Roger Platiel et Hector Saunier - et aux Etats-unis dès le début des années 60 et dans le monde entier dans des expositions collectives, obtenant de nombreux prix prestigieux. Isolde Baumgart-Monson nous a quitté en 2011.
Nota : La très belle photographie de l'artiste que nous avons choisi d'intégrer au menu de ce catalogue raisonné est d'Isolde Baumgart.Bonafous-Murat Arsène
D'un caractère affirmé, Arsène Bonafous-Murat, collectionneur, marchand d'estampes et bibliophile de grande réputation - n'était-il pas un lecteur assidu et passionné? -, est disparu le 18 avril 2011. Pendant deux ans bibliothécaire d'Edmond Bomsel, avocat d'André Breton, et il a acquis une expérience remarquable dans le commerce des gravures auprès de la maison Paul Prouté S.A. qui l'emploiera de 1963 à 1977. Il a fondé deux galeries, l'une à Paris en 1978 (15, rue de l'Echaudé, au cœur de Saint-Germain-des-Prés) que mène encore aujourd'hui son épouse Anne et l'autre à Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn et Garonne), aujourd'hui disparue. Il assurera pendant de nombreuses années l'expertise des estampes pour les ventes publiques de l'Hôtel Drouot, à Paris; et pour d'autres commissaires-priseurs français.
D'une culture sur l'estampe ancienne et moderne tout à fait exceptionnelle, il s'est évertué, sa vie durant, à faire un travail de fond en ce domaine, mettant en avant des oeuvres de graveurs ou de lithographes parfois méconnues, qu'accompagne le plus souvent des publications érudites. Il organisa, parmi tant d'autres, deux expositions des gravures de Roger Platiel, l'une à Paris, l'autre à Sain-Antonin (été 2007). Ses catalogues de vente, liées à sa galerie parisienne, sont à conserver, tant les descriptions de l'expert des estampes qu'il fut y sont précises et donc précieuses.
Bonnafé-Laurent Claire
Dernière compagne de Roger Platiel, elle a, dès la disparition de Roger Platiel et à la demande de Nora Platiel, établi le répertoire des gravures présentes dans l'atelier du graveur à sa disparition. Elle est à l'origine du présent catalogue raisonné pour lequel elle s'est impliqué autant que faire se peut. Elle-même peintre, le peintre surréaliste Raoul Michau* sera son professeur jusqu'à sa disparition en 1981. Auteure, elle a publié trois romans : « Le bruit de la mer » (Editions Balland, Paris, 1977, ré-éditée en 1992), « Le guetteur immobile » (Editions Balland, Paris, 1990) dont on lira une présentation puisqu'il Roger Platiel (Franz) en est le personnage central (dans la rubrique « Index » sous le chapitre « Ecrits ») et « Une lumière dans l'île » (Editions du Seuil, Paris, 1997).
Depuis plus de 35 ans, Claire Bonnafè-Laurent a mis une grande énergie a présenter l'oeuvre de Roger dans des expositions personnelles ou collectives, permettant ainsi à l'oeuvre de survivre.
*
On notera que Roger Platiel dédicacera le 18 mars 1978 sa dernière gravure « Trace » à Raoul et Marthe (Michau) qu'il considérait comme appartenant à sa famille.Bonnafé-Laurent Claire
Dernière compagne de Roger Platiel, elle a, dès la disparition de Roger Platiel et à la demande de Nora Platiel, établi le répertoire des gravures présentes dans l'atelier du graveur à sa disparition. Elle est à l'origine du présent catalogue raisonné pour lequel elle s'est impliqué autant que faire se peut.
Elle-même peintre, le peintre surréaliste Raoul Michau* sera son professeur jusqu'à sa disparition en 1981.
Auteure, elle a publié trois romans : « Le bruit de la mer » (Editions Balland, Paris, 1977, ré-éditée en 1992), « Le guetteur immobile » (Editions Balland, Paris, 1990) dont on lira une présentation (dans la rubrique « Index » sous le chapitre « Ecrits ») et « Une lumière dans l'île » (Editions du Seuil, Paris, 1997).
Depuis plus de 35 ans, Claire Bonnafè-Laurent a mis une grande énergie a présenter l'oeuvre de Roger dans des expositions personnelles ou collectives, permettant ainsi à l'oeuvre de survivre.
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On notera que Roger Platiel dédicacera, le 18 mars 1978, le dernier tirage de sa dernière gravure « Trace » à Raoul et Marthe (Michau) qu'il considérait comme des membres de sa propre famille. Des oeuvres de Raoul Michau seront souvent présentées au Salon des Réalités Nouvelles. Son oeuvre fait partie, en autre, du fond du Musée de Tours et du Musée Cantini de Marseille.
Hayter Stanley William & Désirée
Stanley William Hayter, l’un des maîtres incontestés de la gravure du XX° siècle, est né à Londres en 1901. Son père, qui était peintre, lui donna très tôt le goût des arts ; il s’initie très jeune, mais fait des études scientifiques de haut niveau qui l’amèneront à obtenir des diplômes de chimie organique et de géologie. De 1922 à 1925, Hayter travaille au Moyen-Orient pour de grandes compagnies pétrolières.
Renonçant à sa carrière, il décide de se consacrer à l’art et s’installe à Paris en 1926. Initié à la gravure par Joseph Hecht et Jacques Villon, il ouvre son premier atelier de gravure l’année suivante. Homme ouvert, partageur, aimant l’expérience et la recherche, le travail à plusieurs mains, il ouvre son atelier à tous, atelier qui, naturellement, deviendra un lieu d’enseignement et d’échange. Des centaines d’artistes y travailleront. En 1933, l’atelier de Hayter changeant de lieu, prendra le nom d’« Atelier 17 » qui devient rapidement célèbre mondialement. Tous les grands créateurs de l’époque furent attirés à la fois par l’homme et le lieu : Miro, Arp, Giacometti, Kandinsky, Matta, Ubac, Alechinsky, Tanguy, Masson, Vieira da Silva et tant d’autres, chacun y confrontant recherches et trouvailles. Pour 10 ans (1940-50), le temps d’une guerre et d’une après-guerre, il ouvre son atelier à New York ; là , on y rencontre Pollock, Rothko, Motherwell et tous les tenants de la future nouvelle peinture américaine.
Revenu en France, son atelier va changer plusieurs fois de lieu, restant toujours à la pointe de la recherche et de l’expérimentation. De nombreuses innovations sortiront de l’Atelier 17 ; il faut retenir, parmi elles, la nouvelle possibilité offerte de tirer des gravures en plusieurs couleurs en un seul passage de la plaque sous la presse. Pour Hayter, selon sa rapidité, son intensité et sa direction, chaque trait est chargé de significations intentionnelles différentes. Stanley William Hayter, peintre-graveur abstrait, « poète du trait », a participé à d’innombrables expositions collectives, à des Salons, des biennales et un grand nombre d’expositions lui a été consacré à titre personnel. Il a, en outre, illustré des ouvrages littéraires et un grand nombre de poètes.
Pendant plus de 20 ans, Hayter et son épouse, Désirée*, que ce soit à l'atelier, au cours de nombreux repas ou dans de multiple autres occasions, partageront beaucoup de bons moments avec Roger Platiel et Claire, sa compagne.
Stanley William Hayter est mort Ă Paris, en 1988.
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Désirée Moorhead-Hayter, la dernière épouse de Hayter, a réalisée (avec Peter Black) le formidable catalogue raisonné des estampes de son mari (« The prints », Ed. Phaidon, 1992).
Nowotny Elisabeth (Lisa)
Sa maman et Nora Platiel étaient soeurs d'une famille de douze enfants. Cousine de Roger, de sept ans son ainée, elle connut comme lui l'expérience de l'exil danois à l'Ecole d'Östrupgaard, puis celle qui la mena en Angleterre. Les Nowotny et les Platiel auront un parcours commun de résistance au nazisme. Socialistes engagés, ils décideront de fuir l'Allemagne en 1933, menant leur dangereux combat depuis l'étranger. Après mille péripéties, tous décideront de reprendre leur place dans l'Allemagne de l'après-guerre, voulant participer coûte que coûte à la reconstruction de « leur pays ». Soudés par-delà toutes des difficultés de l'existence, leur entraide ne sera jamais prise en défaut. Au fil du temps, Lisa bâtira une grande collection des gravures de son jeune cousin dont elle admirait le travail. Encore aujourd'hui - elle aura bientôt 89 ans -, quelques gravures de Roger trônent sur les murs de son petit deux pièces dans la maison de retraite de Kassel où elle vit, . . . dans la même rue tranquille que la maison de Ralf Schaper, à . . . cent mètres l'un de l'autre.
On notera que Lisa Nowotny est directement remerciée dans le catalogue Das druckgraphische Werk de 1979.
Platiel-Benguigui Suzy
Un temps épouse de l'artiste. Jeune ethnolinguiste et africaniste dans les années 60, elle découvre - au cours d'un voyage en Afrique avec Roger - les Sanans du Burkina Faso, une ethnie qui, à l'époque, ne connaît pas l'écriture. Cette rencontre confirmera sa vocation. Elle travaillera sans relâche sur le conte, à comprendre sa fonction dans les sociétés à tradition orale. Elle interviendra, dès les années 80, dans les écoles pour le diffuser comme outil d’éducation permettant de recréer le lien social, insistant sur le fait que la maîtrise du langage oral et corporel est essentielle dans le développement de l’enfant, avant d’exiger de ce dernier qu’il ne lise et écrive. Elle est l'auteur de très nombreux ouvrages, films et conférences sur le sujet, n'hésitant pas à continuer, à maintenant plus de 80 ans, de défendre la place de la communication orale directe dans les écoles. Elle est membre du CNRS.
Platiel Nora
Eléonore Block, mère de l'artiste, est née le 14 janvier 1886 à Bochum dans une famille de dix enfants. Après la disparition prématurée de son père, marchand de vêtements pour mineurs, elle doit interrompre sa scolarité et travaille comme secrétaire à la « Confédération allemande pour la maternité et la réforme sexuelle » (Deutschen Bund für Mutterschutz und Sexualreform). Elle rejoint le SPD (parti socialiste allemand) en 1922, et quelques années plus tard la « Ligue internationale socialiste » (Internationalen Sozialistischen Kampfbund). Elle reprend ses études, se consacrant au droit, à la philosophie et à l'économie à Francfort, puis à Göttinguen, obtenant son doctorat qu'elle finalise par un stage à Kassel. Elle travaille en tant qu'avocate à Bochum en 1931. Elle est, dès cette période, une farouche opposante du parti nazi qui monte en puissance et s'implique activement dans le « Secours rouge » (Rote Hilfe). Après l'arrivée au pouvoir du parti nazi en 1933, elle s'enfuit en France avec son groupe d'amis politique, connu sous le nom du « Groupe de Paris », et sera très active, entre autres, dans l'organisation d'aide aux réfugiés ; elle participe au magazine « Das Neue Tage-Buch », magazine des exilés allemands. Après le début de la guerre, elle est emprisonnée au Camps de Gurs (près d'Oloron-Sainte-Marie, dans ce qui est aujourd'hui les Pyrénées-Atlantiques), mais son futur mari, Hermann Platiel ("Germain l'allemand" de son nom de résistant), revenu de la Guerre d'Espagne, réussit à l'en faire sortir. Le couple se marie le 14 janvier 1941 à la Mairie de Montauban ; Hermann Platiel reconnaît Roger comme son propre fils à cette occasion. Le couple vit dans la clandestinité, mais réussit a passer en Suisse ; ils y seront un temps internés. L'un des frères de Nora Platiel, Max, meurt à Auschwitz en octobre 1944.
Le couple regagne l'Allemagne après la guerre (en 1949) et, réintègrant les rangs du SPD, s'installe à Kassel. Elle devient un membre important de la commission chargée de la restitution des biens volés aux juifs avant et pendant la guerre. Nora Platiel travaillera aussi comme conseillère au tribunal du district de Hesse à partir de 1951, dont elle deviendra la première directrice à la Haute Cour régionale de Francfort. Entre 1954 et 1966, elle sera élue au Parlement de Hesse, spécialiste de la politique juridique et culturelle. En 1962, bien que proposé par le Premier ministre, elle est battue dans un vote pour l'élection du président du Parlement. De 1960 à 1966, elle est présidente du groupe SPD au Landtag de Hesse. De 1966 à 1968, elle sera membre de la Cour d'Etat de Hesse, parmi d'autres fonctions.
Nora Platiel a reçu l'Ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne. En 1969, elle reçoit la médaille Wilhelm-Leuschner, la plus haute distinction de l'État de Hesse. A Kassel, dans l'enceinte de l'Université, une rue qui porte son nom depuis 2007, non loin d'une autre rue qui porte le nom d'Arnold Bode, le fondateur de la Documenta de Kassel, l’exposition d’art moderne mondialement connu.
Dès le début de sa carrière artistique, Nora Platiel aura toujours été très fier de l'oeuvre de son fils et, souvent, elle agira pour Roger comme un véritable agent artistique, faisant sa promotion auprès de galeries et d'institutions allemandes, lui trouvant clients et acheteurs, tenant un carnet des ventes et des comptes pour son fils. Elle n'hésitera jamais à se servir de ses immenses relations pour mettre les gravures de Roger en avant - ce qui avait souvent le don d'agacer Roger!.
Au décès de son fils unique, le 20 juin 1978, elle s'efforcera de regrouper l'ensemble de son oeuvre gravé dont elle fera don au Musée Staatlichen Kunstsammlungen de Kassel où une grande rétrospective s'ouvrira le 12 janvier 1979. Nora Platiel rêvait qu'un catalogue raisonné de l'oeuvre gravé de son fils soit établi, car elle était intimement persuadé que son oeuvre le méritait ; le catalogue publié à l'occasion de cette rétrospective sera un premier pas important dans ce sens.
Un peu plus d'un an après la disparition de Roger, Nora meurt le 6 septembre 1979 à Kassel où elle repose auprès de son mari, "Germain" Hermann Platiel (mort en 1980). La ville de Kassel souhaite, dans un proche avenir, donner à la tombe du couple une Distinction d'Honneur particulière.
Littérature (en langue allemande) : « Nora Platiel - Socialiste, Emigrante, Politicienne - Une biographie », par Helga Haas-Rietschel, Bund Verlag, Cologne 1989Saunier Hector
Peintre-graveur raffiné et incomparable, d'origine argentine, Hector Saunier est né à Buenos Aires en 1936. Il va vivre ses 25 premières années d'existence sous les régimes dictatoriaux de son pays. Il entreprendra des études d'architecture, tout en faisant différents «
petits boulots » qui lui permettront d'économiser pour faire le grand voyage qu'il a en tête. La grande traversée aura lieu en 1961. Hector Saunier s'installe à Paris. En 1966, le hasard lui fait rencontrer Stanley William Hayter et il décide d'étudier la gravure au sein de l'Atelier 17. Saunier apprend son métier principalement auprès de Hayter, qui reconnaitra vite son talent. Il devient rapidement un maître de la couleur et de la lumière, mettant toutes sa richesse créative au service de l'impression en taille-douce.
Hector Saunier sera assistant à l'Atelier, travaillant en étroite collaboration avec Hayter pendant vingt ans. En 1978, il deviendra Directeur Associé de l'Atelier 17, le prenant en charge pendant les absences de Hayter.
Sa grande virtuosité technique et artistique le mènera à tirer une grande partie de l'oeuvre de celui qu'il considère comme son Maître. Hector Saunier est aujourd'hui co-directeur, avec Juan Valladares, de l'Atelier Contrepoint, nom qui fut donné à l'ancien Atelier 17 à la mort de Hayter en 1988. Perpétuant la tradition, l'Atelier Contrepoint est un atelier expérimental fréquenté par des artistes et étudiants venus de toutes les contrées du monde, un lieu d'échanges et d'apprentissage.
Hector Saunier sera l'ami précieux et le «
frère » complice de Roger Platiel plusieurs années durant.
Schaper WilliAmie des Platiel, la famille Schaper ne quittera pas l'Allemagne pendant la période noire. Socialiste engagé, formé à Ecole de Walkemühle pour le combat idéologique et politique contre l'inexorable montée en puissance nazi, puis contre le pouvoir en place, Willi Schaper mènera la résistance à l'intérieur de son propre pays. La maison où vit la famille à Kassel sera détruite en 1943 par les bombardements anglais, et il faudra attendre encore avant la capitulation de l'Allemagne. Les Schaper aideront autant qu'ils le pourront les Platiel lors de leur retour en Allemagne en 1949. Willi et Else Schaper créeront un orphelinat pour les enfants victimes de la guerre. Malgré l'écart de leurs âges, dès les années 50, Willi Schaper sera très proche de Roger et aura sa vie durant une grande amitié pour lui, l'encourageant dans son travail en lui achetant de nombreuses gravures.
En hommage à la famille Schaper, nous avons souhaité intégrer ici deux photographies de Kassel prises après les bombardements anglais (photo la ville prise en 1947, fournie aimablement par la Stadtarchiv de Kassel, puis la maison au 8 Am Fasanenhof - prise de W. Schaper en octobre 1943 - où vivait la famille Schaper - appartement du deuxième étage), et deux photographies d'enfants prises dans l'orphelinat qu'elle avait créé pour les enfants victimes de la guerre.